Suite aux collages anarchistes féministes (Région Parisienne/2013)

Nous avons réalisé un collage sur différents lieux de la région
parisienne, pour lutter contre les violences sexistes. Au Transfo, nous
avons collé et affiché en texte central : « Pas d’espace pour les
agresseurs ! Pas d’agresseurs dans nos espaces ! ». Parmi les réactions
suscitées par ces collages, la majorité de celles qui sont venues du squat
du Transfo (Bagnolet) se démarquent par leur caractère antiféministe et
autoritaire. Pendant les semaines qui ont suivi, si on écoutait les
commentaires de certain-e-s sans se poser de questions, il aurait fallu
croire que le problème venait du collage réalisé par des
anarchistes-féministes pour dénoncer des violences sexistes, et non pas de
ces violences sexistes elles-mêmes. Le collage a été diabolisé et marqué
par plusieurs agressions de certaines d’entre nous.

ANARCHISME ET FEMINISME

En tant qu’anarchistes-féministes nous partageons
des principes éthiques et des pratiques d’entraide et de solidarité contre
les violences hétéro-patriarcales. Nous luttons en amont contre les
violences sexistes pour les prévenir : créer des liens entre des femmes,
discussions, partage d’analyses et de textes, autodéfenses, ouvertures et
prises d’espaces occupés non-mixtes. L’hétéro-patriarcat est un système
d’organisation sociale, politique et économique qui institue notamment la
domination des hommes contre les femmes. Il est absurde de penser que le
patriarcat peut s’esquiver. Les agressions sexistes comme les viols, les
violences conjugales, les harcèlements, arrivent nécessairement, et c’est
pour cela que nous appelons à des positionnements individuels, et des
positionnements collectifs de lieux d’habitations et de lutte pour que
différents principes, tels que l’ostracisation des agresseurs, soient mis
en pratique, en solidarité avec des femmes ayant subi ces violences
sexistes. En tant qu’anarchistes-féministes, nous refusons fermement de
faire appel à la police, à la justice ou à une quelconque médiation de
l’Etat, pour en finir avec des agresseurs. Nous refusons toutes les
médiations, et toute autorité d’un milieu. Nous sommes pour l’action
directe et l’autodéfense des femmes. Nous refusons de réduire ces
questions à des problèmes inter-individuels qui ne devraient pas venir
troubler les ’’vraies’’ luttes. La guerre sociale est partout, tout le
temps. Nous refusons fermement ’’le cas, par cas’’ qui consisterait dans
la pratique à une justice informelle, que nous propose des dits
’’antiautoritaires’’ qui veulent être juges. Nous ne reconnaissons aucune
autorité et ne déléguerons à aucune autorité la capacité de dire si nous
avons subi des violences sexistes ou non. Concernant les procès proposés
par des dits ’’anti-autoritaires’’ nous rejetons dans le détail leur
proposition : confrontation agresseurs/ agressées, injonction faites aux
femmes à rendre publique et donner des détails de ce qu’elles ont subi, et
enquêtes sociales informelles (faites qui plus est contre les agressées
pour trouver des éléments à leur reprocher et les rendre responsable de
l’agression). Nous refusons que les femmes qui ont subi des violences
sexistes soient mises en danger et subissent encore plus de violences
sexistes (indifférence, voyeurisme, culpabilisation, infantilisation,
humiliations, malveillance, harcèlement, mépris et curiosités misogynes,
mise sous pression et stress, revivre traumatisme…) de la part de dit
’’antiautoritaires’’ aux pratiques de juges, de flics, de psy etc…

PAS D’AGRESSEURS DANS NOS ESPACES ! PAS D’ESPACE POUR LES AGRESSEURS !

Ce collage a révélé que la situation actuelle dans la plupart des lieux
d’habitation ou de lutte est affligeante de lâcheté, d’antiféminisme et
d’autoritarisme. Certains espaces soutiennent les agresseurs, les
hébergent, les tolèrent et leur permettent de continuer de faire subir ces
mêmes violences sexistes à d’autres femmes. Le Transfo (comme certains
squats d’habitation, ou espace de lutte) n’a aucune position concernant
l’ostracisation des agresseurs. Certain-e-s habitant-e-s et
participant-e-s du Transfo s’enlisent dans une position de défense d’un
agresseur sexiste notoire habitant du Transfo. Les espaces qui
n’ostracisent pas les agresseurs méprisent, isolent, excluent de fait les
femmes ayant subi des violences sexistes. Nous ne considérons pas comme
nécessaire que les agresseurs reconnaissent ce qu’ils ont fait pour mener
une action contre eux. Si les agresseurs reconnaissent ce qu’ils ont fait
: ça ne changera rien au fait que nous mènerons une action contre eux.
Nous rejetons cette culture chrétienne et morbide du pardon. Dans
l’immense majorité des cas, les agresseurs ne reconnaissent pas les
harcèlements, les violences conjugales, les viols qu’ils font subir aux
femmes, au contraire, avant et après, ils harcèlent et contrôlent les
femmes qu’ils ont agressées, cherchent à les punir parce qu’elles ont osé
dire/ ou qu’elles pourraient dire/ ce qu’elles ont subi ou subissent
encore. Les agresseurs et leurs soutiens mènent de véritables campagnes de
décrédibilisation des femmes qu’ils ont/ qui ont été/ agressés, ce qui a
pour conséquence que quoi que diront ces femmes, elles ne seront pas
entendues. Nous refusons de discuter avec des ennemis politiques, avec
ceux qui incarnent les différents systèmes d’oppressions : des flics…aux
agresseurs hétéro-sexistes. Nous n’évoluerons pas dans les mêmes espaces
qu’eux, les agresseurs ayant bien compris où étaient leurs intérêts, ils
s’en prennent systématiquement aux anarchistes-féministes.

ANTIFEMINISMES : NEGATION DES VIOLENCES SEXISTES.

Systématiquement les réactions des antiféministes s’inscrivent dans la négation des violences sexistes. Ils/elles ne veulent pas entendre, ni voir, ni que l’on
visibilise les violences sexistes comme nous avons pu le faire avec le
collage. Systématiquement ils/elles nient, euphémisent, banalisent et
attribuent une signification différente à tel ou tel fait, quelque soit
leur gravité. Ils/elles assignent au silence les femmes ayant subi des
violences sexistes quand elles et ils ne vont pas jusqu’à les agresser
verbalement ou physiquement pour maintenir la pacification dans les
différents milieux politiques.

ANTIFEMINISMES : NEGATION DES SYSTEMES DE DOMINATIONS HETERO-PATRIARCAUX.
Les antiféministes refusent de reconnaître l’existence des systèmes de
dominations hétéro-patriarcaux, laissant place, où y substituant :
– du gauchisme : c’est à dire une lutte androcentrée et parcellaire contre
le capitalisme.
– des analyses libérales et autoritaires : où les violences sexistes
seraient une affaire de ’’personnalité’’, de ’’caractère’’, ’’de psy’’, de
’’déviants’’ (alcoolique, toxico), de rapport inter-individuel.
– des analyses racistes : où les violences sexistes seraient l’apanage des
hommes racisés.
– des analyses bourgeoises : où les violences sexistes seraient le fait
des classes populaires, peu éduquées. Or l’hétéro-patriarcat est un
système d’organisation sociale, politique et économique qui institue la
domination des hommes contre les femmes. Ce système d’oppression est
inter-classiste, et ne connaît ni milieu, ni frontière.

ANTIFEMINISMES : FAUX ARGUMENTS.

Certain-e-s antiféministes accusent le
collage d’être essentialiste. Or le fait de partir de situations
d’oppressions sexistes réellement vécues ne revient pas à revendiquer une
identité féminine. Pour sortir d’une cage encore faut-il être capable d’en
voir les barreaux. Nous partons de vécus de femmes en tant que catégorie
construite socialement parce que nous n’attendons pas que les dominants
nous libèrent ou aillent à l’encontre de leurs intérêts. Nous dénonçons
les analyses libérales et hypocrites des hommes qui affirment ne pas se
reconnaître dans la catégorie ’’hommes’’ tout en continuant à tirer des
privilèges qui découlent systématiquement de cette position sociale et
auxquels ils ne sont pas prêts à renoncer.

ANTIFEMINISTES : PORTE PAROLE DES AGRESSEURS.

L’antiféminisme (de l’antiféminisme des fascistes…à l’antiféminisme des communistes ou
anarchistes) est une expression directe de la misogynie. Les
antiféministes, femmes comme hommes, ont la haine des femmes. Cependant
nous ne mettons pas sur le même plan ces deux positions. Pour les femmes
l’antiféminisme provient en grande partie d’une position de survie qui
passe par l’association avec les dominants, l’identification aux
oppresseurs, et la haine de soi. Alors que pour les hommes antiféministes,
il s’agit d’une position de solidarité masculine. Être solidaire des
agresseurs est un moyen pour eux de se couvrir, tout en couvrant les
autres et d’asseoir le pouvoir des hommes contre les femmes. Les
agresseurs instrumentalisent ou rallient des femmes misogynes contre les
femmes qu’ils ont agressés, ou leurs soutiens, soit préventivement, soit
pour poursuivre leur sale boulot d’agression et maintenir leur place dans
un espace.

ANTIFEMINISTES : UN SEUL BUT REHABILITER LES AGRESSEURS.
Les antiféministes nous attaquent, nous culpabilisent, et inversent les
responsabilités en faisant de l’opprimée une ’’oppresseuse’’. Ils/elles
cherchent à discréditer les femmes ayant subi des violences sexistes et
leurs soutiens par tous les moyens. Ils/elles utilisent les pratiques des
agresseurs : validation de la victimisation des agresseurs, manipulations
et calomnies. Ils/elles attaquent de manière insidieuse les femmes en leur
renvoyant à la gueule les violences sexistes qu’elles ont subies. Enfin,
les antiféministes sont des poukaves (préviennent, informent les
agresseurs) et mettent en danger la vie des femmes ayant subi des
violences sexistes. Les antiféministes sont prêts à défier toutes
logiques, rationalités, et tous principes éthiques. Ils/elles n’ont qu’un
seul objectif : réhabiliter les agresseurs. Et en plus de cela, ils/elles
nous accusent d’’’inefficacité’’ dans nos luttes contre des systèmes
d’oppressions hétéro-patriarcaux contre lesquelles ils/elles ne luttent
pas mais contribuent à les renforcer. Les antiféministes sont incapables
d’entraide envers les femmes ayant subi des violences sexistes, ils/elles
sont contre l’ostracisation des agresseurs, et de plus, ils/elles
cherchent à décourager, démobiliser et réprimer toutes formes d’entraide,
de solidarité et d’actions contre les violences hétérosexistes, en étant
contre la non mixité offensive.

AGRESSIONS D’ANARCHISTES-FEMINISTES AU TRANSFO PENDANT, ET APRES LE COLLAGE.

Nous avons été accusées d’agression envers un agresseur habitant
du Transfo pendant le collage anarchiste-féministe sur la seule base des
mensonges, de la manipulation et de la victimisation de cet homme. Les
habitant-e-s et les participant-e-s de l’AG du Transfo sont au courant que
C. a fait subir des violences conjugales à plusieurs femmes. Nous avons
appris que C. avait instrumentalisé la mort de sa mère pour se victimiser,
inventant de toute pièce des insultes que nous aurions proférées contre
elle et manipulant les personnes autour de lui. Ce genre de procédé est
particulièrement abjecte. En réalité, le jour du collage, une fois que C.
a lu les affiches, il a cherché par différentes façons à nous intimider.
Il a d’abord tenté de mettre la pression à celle d’entre nous qui a déjà
eu a subir des violences conjugales de sa part, pour essayer d’obtenir sa
complicité et lui faire dire qu’il n’était en rien concerné par les
affiches. Puis, alors que nous partions, il nous a suivies dans la rue
avec une attitude et des propos menaçants alors que nous lui demandions
d’abord calmement, puis plus vivement, de ne pas le faire. Pour finir, il
a cherché à renverser la situation et ainsi passer du statut d’agresseur à
celui de victime en évoquant des faits hors de propos et sans aucun
rapport avec le collage. Si C. est un menteur et un manipulateur, cela ne
déresponsabilise en rien ceux qui ont contribué et contribuent encore à sa
victimisation. D’autant plus que celle d’entre nous qui a été accusée à
tort d’avoir ’’insulté la mère de C.’’ a ensuite été agressée physiquement
à deux reprises par une habitante du Transfo qui, en plus de donner libre
cours à son antiféminisme haineux, cherche à soutenir un agresseur sexiste
contre des d’anarchistes-féministes. Les antiféministes et autoritaires
n’ont pas à se mettre sur notre chemin, si nous avions mené une action
d’attaque de C. cela n’aurait toujours pas justifié le fait d’être
agressées. Ces précisions faites, nous refusons que ce collage se réduise
à C. ! Le collage est contre lui et contre tous les autres agresseurs !
Tout ce que nous aurions pu entreprendre comme action anarchiste-féministe
aurait eu pour conséquences que certains agresseurs comme C. se sentent
visés et cherchent par tous les moyens à noyer le poisson, parce que C.
comme d’autres, ont pleinement conscience des violences sexistes qu’ils
ont exercé et exercent encore. Une grande partie des habitant-e-s et des
participant-e-s au Transfo choisissent de fermer les yeux sur les
agressions sexistes réelles que subissent les femmes. Par contre ils/elles
savent s’indigner publiquement pour une fausse agression
d’agresseur-habitant ainsi que pour un collage anarchisteféministe qui
serait ’’violent’’. Alors que la forme qui prendrait le collage avait été
acceptée par l’AG, certain-e-s se plaignent aujourd’hui, sur la base de
leur fonctionnement autoritaire, que nous n’ayons pas prévenu date et
heure, et que nous n’ayons pas été encadrées pendant le collage. Précisons
d’ailleurs que si ces conditions avaient été posées, nous aurions refusé
de faire le collage. Nous avons fait un collage collectif, non pas
militant (formalisme, suivisme, division des tâches) ou artistique (donc
pas de spectateurs) (Relire CR. AG du 8 septembre). Certain-e-s
habitant-e-s et participant-e-s à l’AG du Transfo qui sont au courant
concernant C., le soutiennent sur des bases autoritaires, par suivisme
affinitaire (de pote) et identitaire (de squat/Transfo), par absence
d’éthique individuelle et collective concernant les violences sexistes,
par misogynie et par antiféminisme. Certain-e-s habitant-e-s autoritaires
et antiféministes vont plus loin que d’autres, ils revendiquent l’espace
collectif du Transfo comme étant leur propriété d’habitant et remettent en
cause l’autonomie de l’espace collectif du Transfo par rapport à l’espace
d’habitation. En bon autoritaire, ils/elles créent de toute pièce des
’’ennemies extérieures’’ qui attaqueraient, déstabiliseraient, l’espace
d’habitation et le Transfo, inventent ’’un groupe’’ qui seraient ’’ne
compte pas sur notre silence’’ et qu’il serait nécessaire d’exclure. Nous
sommes allées à l’AG du 3/11 (le lendemain du collage), et sachant par
avance qu’une discussion sur le fond ne serait pas possible pendant l’AG,
nous avons décidé d’y participer pour proposer à celles qui serait
intéressées un cadre dans lequel une telle discussion serait possible.
Nous n’avions alors pas souhaité démentir les accusations d’un
agresseur-sexiste-notoire habitant du Transfo (accessoirement, non présent
à l’AG du 3/11) parce que nous refusions de discuter avec un agresseur (et
à partir de ses propos) ou par la médiation de ses représentant-e-s
habitant-e-s antiféministes et autoritaires. Et surtout, nous n’avions pas
souhaité démentir parce que ça ne devrait pas être à nous de gérer les
pratiques d’agresseurs lorsqu’ils calomnient, se victimisent et
manipulent, mais aux personnes qui tolèrent ces agresseurs dans les
espaces d’habitation ou collectif. À l’image du climat qui rendait
impossible une discussion de fond en AG, une participante de l’AG s’est
mise sur notre chemin pour nous empêcher de sortir de la salle après notre
intervention, bloquant la porte, nous empêchant de partir, nous donnant
des ordres, exerçant une pression physique et verbale autoritaire et
antiféministe (« vous retournez l’oppression à l’envers », « vous allez
rester ici on va discuter de vos méthodes et pratiques », « on va pas chez
les gens pour insulter leur mère. Insulter la mère des gens c’est
politique. »). Après quelques minutes d’attente, elle a été maîtrisée
physiquement par des participante- s de l’AG. L’AG ne s’est pas
positionnée pour affirmer son soutien au collage contre les violences
sexistes, et c’est dans ce contexte que certaines personnes se permettent
de prendre la défense d’agresseurs, par une surenchère de comportements
violents. La situation est hautement problématique. Il est inacceptable
qu’un simple collage suscite de telles violences réactionnaires. Des
positionnements individuels et collectifs clairs sont nécessaires pour
condamner cette répression antifeministe et autoritaire. La question des
violences sexistes est très loin d’être accessoire, et personne ne peut
esquiver ce problème sans être complice de leur renforcement. Il est
indispensable que chaque individu et collectif développent dès maintenant
une éthique leur permettant de se confronter et de lutter contre ces
oppressions. Nous encourageons et soutenons les femmes anti-autoritaires,
anarchistes à s’organiser en non mixité sans autorité, direction, contrôle
masculin, afin de pouvoir prendre conscience de l’oppression
hétéro-sexiste, construire une autonomie individuelle et collective,
développer une éthique et des pratiques d’entraides et de solidarités
contre l’hétéro-patriarcat. Substituons à la résignation l’affrontement de
l’hétéro-patriarcat (de la galanterie au meurtre) contre ce-ux qui nous
opprime-nt et ce-ux qui nous détrui-sent.

Contre toute domination, autorité, exploitation, et oppression, détruisons
le patriarcat et la société qui va avec !

Des anarchistes féministes.

09/01/2014

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